lien de l'extrait: https://www.youtube.com/watch?v=67jgvKFBCsY&list=PLCF628219E457CADE&index=9&t=0s

En quoi cette séquence expose-t-elle parfaitement la douleur de la séparation ?

Cet extrait montre la séparation déchirante de Georgiana avec sa fille née hors mariage. En effet, la duchesse meurtrie a choisi par le passé de donner libre cours à son amour pour M. Grey tout en assouvissant un désire de vengeance vis-à-vis de son mari le Duc. Celui-ci l’a trompé avec la seule amie qu’elle avait la détruisant mentalement et la tournant vers le désir d’une affection qu’elle n’a jamais eu dans son mariage.
La majorité de la séquence alterne entre le plan mobile de la duchesse tout d’abord récupérant son enfant des bras de la nourrice puis marchant vers la droite, vers la famille de Charles Grey. Celle-ci, venue emporter l’enfant, est filmée en plan fixe et de face. Cette différence montre que la famille est une fatalité, elle est présente dans un but précis et n’a aucun doute, aucune hésitation sur la situation. Au contraire, Georgiana va vers la droite et regarde dès la descente du carrosse dans cette direction, ce qui montre qu’elle est consciente de son action. Elle est fixée sur ce point et ne le lâche que pour porter son attention sur on enfant comme pour lui montrer aussi ce qu’il va se passer.
Dès qu’elle commence à se mettre en mouvement le champ s’ouvre sur l’arrière plan. On voit donc qu’elle n’est pas seule dans cette épreuve, notamment grâce à la présence d’Elisabeth qui reste à ses cotés au fil de l’intrigue. Ces personnes sortent du champs après quelques pas ce qui exprime le désir et le besoin d’accomplir cet acte seule.
Ensuite vient un plan de Georgiana de dos marchant droit vers la famille Grey. On voit donc pour la première fois leur identité. Ils sont venus avec deux carrosses arrêtés côte à côte comme pour marquer un encadrement. Le contraste des couleurs est très marqué entre eux, tout en noir et elle en robe blanche printanière. Sa robe montre une sorte d’insouciance de la jeunesse, de simplicité avec les cheveux en bataille tandis qu’eux sont comme endeuillés.
La caméra bouge d’un coup pour venir se fixer sur le nourrisson et remonter pour faire un gros plan sur le visage de la Duchesse dévastée. Cet enchainement montre, lui, l’attachement qu’elle porte à son bébé et ce qui lui en coûte. L’arrière-plan est flou fixant l’attention sur ce moment.
La caméra recule ensuite pour avoir une vue panoramique de la duchesse marchant jusqu’à ce que le Général Grey se présente, pile au moment où il entre dans le champ. Ils sont alors chacun à une extrémité du cadre montrant la distance, la barrière que la duchesse tente de mettre entre eux comme pour retarder le moment fatidique. Elle reste dans une posture très droite en serrant son enfant contre elle dans un geste de protection de soi. Au contraire le Général tente une approche, il se frotte les mains comme pour montrer que la tâche ne sera pas aisée mais qu’il y met du sien.
Après avoir eu un zoom progressif sur Georgiana tandis qu’elle embrassait le poupon, la caméra fait un plan moyen (épaules) de Elisabeth. Ce plan sert à rappeler sa présence pour soutenir le personnage : elle est juste derrière elle. C’est d’ailleurs après ce rappel que Georgiana prend l’initiative d’un mouvement pour briser la distance.
Le plan qui accompagne est mobile et  fixé sur l’enfant. On le suit lorsque la nourrice l’emmène en entendant le désespoir d’une mère en hors champ. Celle-ci rappelle le Général, comme pour revenir sur son acte. Elle prononce alors ses seuls mots de la séquence « Her name’s Eliza » (elle s’appelle Elisa). Elle donne ici une identité à sa fille qu’elle a porté pour que celle-ci garde quelque chose de sa mère.
Le plan repasse derrière la Duchesse et le spectateur voit au loin sa fille et le général  s’en aller. Ce plan intensifie l’aspect dramatique de la situation auquel sont de surplus rajoutés les pleurs intra diégétique de la fillette. La duchesse s’effondre dans les bras d’Elisabeth après le moment où la caméra revient face à elle.
La séquence se finit par Georgiana effondrée au premier plan tandis que les carrosses s’éloignent en arrière-plan vers le point d’horizon.  Ce plan annonce un  nouveau départ pour chaque personnage, autant la mère qui se sépare de sa fille que la fille elle-même emportée dans une autre famille.
L’intégralité de la séquence se déroule par ailleurs dans une sorte de marais, isolé de tout. Le paysage plat et plein d’eau montre que la duchesse n’a aucun échappatoire, aucun appui dans la nature. De plus, les couleurs sont ternes comme lors d’une matinée nuageuse et les marécages apportent une sorte de brouillard. La scène a l’air presque irréelle, sortie d’un songe, d’un mauvais rêve.
Cet extrait est très différent de La princesse de Clèves puisque cette dernière n’a jamais eu d’enfant donc ne connaît pas la douleur que l’on peut ressentir en les abandonnant. Elle n’a, de plus, pas succombée à l’appel de l’infidélité par amour. Son mari, M. de Clèves, l’aimait de tout son cœur et n’a jamais voulu la bléser ou la brusquer de tout son vivant.

Alexa FOULON 1GEN1