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EL 5 : Bovary

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G. Legoff
Professeur de Français

G. Legoff




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MessageSujet: EL 5 : Bovary EL 5 : Bovary EmptyLun 6 Avr - 9:59

Explication linéaire Madame Bovary – III, 8 – 1857 – Flaubert, La mort d’Emma
« Sa poitrine aussitôt se mit à haleter rapidement. » à « Elle n'existait plus. »

Vivant un mariage médiocre et décevant, Emma, qui rêve de grandes aventures amoureuses comme dans les romans, décide de tromper son mari et de dépenser sans compter pour vivre luxueusement. Rodolphe, son amant, ayant renoncé à partir avec Emma, celle-ci revoit Léon et devient sa maîtresse. Elle contracte des dettes auprès du marchand Lheureux qui finit par lui demander de la rembourser. Rodolphe et Léon refusent tous les deux de l’aider. Emma, se sentant prise au piège, décide de s’empoisonner avec de l’arsenic dérobé chez le pharmacien Homais. Son mari Charles est à son chevet alors qu'elle est mourante, tout comme le prête qui l'accompagne dans la mort. Emma subit les effets du poison, alternant entre manifestations physiques brutales et douloureuses et évasions brumeuses spirituelles, entre le repentir et la contemplation. Après l'extrême onction du prête, elle subit le « dernier éveil », cette dernière vision du repentir et de sublimation qui lui permet d'atteindre le salut, avant de finalement mourir. Notre extrait est juste après cet éveil, quand elle glisse dans la mort en subissant les dernières manifestations du poison. (SITUATION DE L'EXTRAIT) (LECTURE) En quoi la mort progressive d'Emma représente-t-elle le final inévitable de cette victime de la société ? (PROBLEMATIQUE) Nous verons tout d'abord l'arrivée progressive de la mort, manifestée par l'agonie violente d'Emma, puis le symbolisme de cette mort, à savoir la non-existence d'Emma. (MOUVEMENT)

I. L'arrivée progressive de la mort : les manifestations physiques de l'agonie (l.1 à 10)

La mort arrive progressivement. Les paragraphes qui précèdent notre extrait décrivent l'extrême onction et la sublimation spirituelle d'Emma (entraînée par le poison mais aussi par l'approche spirituel et religieux de la mort). Une chose est sûre, la mort est en chemin et elle se manifeste physiquement dans le début de notre extrait, mettant en avant l'agonie endurée par Emma à cause du poison.
De la ligne 1 à la ligne 10, nous avons un enchaînement qui serait comme une conséquence directe de la contemplation qui précède notre extrait, enchaînement introduit par l'adverbe « aussitôt » à la ligne 1. Notre extrait nous introduit au moment de l'agonie final, au temps de l’effroi face à la mort : « pâlissait l.2 / effrayante / souffle furieux ». A la ligne 3, l'agonie est aussi dramatisée par les sentiments ressentis par Emma.
Notre extrait est un tableau saisissant, presque fantastique mais en même temps très réaliste : Flaubert est le fils d’un médecin ! Il ne cache rien de l’agonie, de l'horreur physique de la mort comme le montre le lexique du corps et de la médecine : « poitrine / haleter / langue / bouche / yeux / en roulant / pâlissaient / côtes / souffle ».

Le corps d’Emma semble agir seul. Elle ne contrôle plus rien, elle n'est plus un sujet au commande de son corps, décidant des mouvances de son corps, elle n'est qu'un objet subissant les manifestations du poison. Un sujet déjà mort, un cadavre déjà objet. A la ligne trois, la comparaison « comme si l’âme eût fait des bonds pour se détacher » représente le moment de la séparation de l'âme et du corps, ce moment de la mort où le corps n'est plus qu'un objet (cadavre) et où le sujet disparaît totalement.
De la ligne 4 à la ligne 10, nous avons la réaction de son entourage qui est comme un public. Ils sont les spectateurs de la scène, tout comme nous, lecteurs : « Félicité … / le pharmacien .. jarrets (comique) / Bournisien … / Charles… », ce qui donne un effet théâtral à travers notamment la posture conventionnelle, théâtralisée des personnages qui sont fixes. La fixité des personnages secondaires dessinent un tableau comique de cette mort tragique.

Emma est mourante, elle est à l'agonie. La fin de notre extrait est celui de l'atteinte de la mort, mais cette mort a une dimension symbolique forte.

II. Le symbolisme de la mort : la non-existence d'Emma (l.11 à 30)

De la ligne 11 à la fin, Emma atteint la mort et sa mort se mêle à un chant extérieur, un chant très symbolique.

A la ligne 11, la locution adverbiale de temps (« tout à coup ») qui suit « le glas de cloche ». A la ligne 10, « Un bruit de gros sabots / frôlement d’un bâton / voix rauque », ces expressions représentent les manifestations sonores de l’Aveugle, une figure de la damnation, une apparition dramatisée qui provoque une réaction brutale d’Emma à la ligne 17 « Emma se releva …béante », comparaison d'Emma à un corps devenu « objet » « cadavre ».

Les lignes 15 à 16, 18 à 21 et 26 à 27 représente la chanson de l’Aveugle qui a des résonances avec le passé d’Emma et son destin inévitable. En effet, on retrouve :
Allusion à ses « rêves d’amour » à la ligne 16 « fait rêver fillette à l'amour »
Allusion grivoise à ses adultères à la ligne 15 : « les épis » qui représentent les amants d’Emma, mais aussi à la ligne 26 avec l'expression « le jupon court s’envola », image de légèreté qui représente ses adultères.
Allusion à la « faux » à la ligne 20 à savoir la mort, fin tragique qu'elle ne pouvait éviter.

Ainsi, la mort d'Emma est à la fois symbolisée par la culpabilité d'une pécheresse (coupable d'adultère, condamnée par la morale et la religion comme l'indique le chant), mais aussi par la souffrance d'une victime qui voit ses « rêves d'amour » détruits par le « sillon » dont elle est victime. Avant même de cesser d'exister, Emma semblait déjà non-existante dans cette vie vide et décevante où les rêves sont balayés par les « sillons » et les « fillettes » par la « faux » : la mort était son destin.

A la ligne 23, on retrouve l'exclamation de l'effroi. L’Aveugle apparaît à Emma comme un ange exterminateur venant punir les fautifs, un ange de la mort : cette « face hideuse » lui crée un « épouvantement ». L'Aveugle se fait l’expression du Destin, de la fatalité. Son irruption presque surnaturelle, son infirmité fait penser à la tragédie antique : Tirésias, le voyant aveugle par exemple. Tout cela participant de la dramatisation de la scène achevée.

A la ligne 24, on retrouve « un rire atroce, frénétique, désespéré » qui serait l'expression du tragique le plus saisissant. Emma se sent et se sait condamnée. On retrouve un rythme ternaire, le chiffre 3 était souvent lié à la religion catholique, on peut supposer qu'il représente la mort d'Emma, les trinités et la préparation du jugement dernier et donc la condamnation d'Emma.

A la ligne 28, « une convulsion…plus », on retrouve trois phrases très brèves mais aussi frappantes. Le regard sur Emma est son dernier acte de vivante : il s'agit du regard de son public (en sachant que sa dernière action est aussi de regarder « croyait voir » : ses deux derniers actes sont de voir et d'être vue). Elle est au centre de l'attention et s'oppose à son public par la distinction du « tous » et du « elle », « tous s'approchèrent » pour constater qu' « elle n'existait plus », pour faire que le dernier acte d'Emma avant de mourir pour de bon soit d'être vue.

Sa mort et le point culminant et la chute finale qui lui était destinée. Sa mort est formulée par une phrase négative qui représente son existence romanesque niée : « elle n'existait plus », ou bien elle n'avait jamais vraiment existé.

La mort d’Emma lui donne l'image de la femme damnée, condamnée pour ses péchés, mais aussi de la femme victime de la société, obligée de mourir pour se soulager de sa non-existence causée par ses rêves détruits et son mariage médiocre et destructeur. Sa mort est dramatisée, au point d'en devenir grotesque notamment par le mélange de tragique (une mort tragique) et de comique (personnages secondaires). Emma n'aura eu ni une vie romancée, ni une mort romancée : elle cesse d'exister sans jamais avoir existé réellement. La mort semble être l'aboutissement du malheur, la porte de sortie dans une voie sans issue qu'était le mariage ou bien la punition divine des pécheurs et des fautifs. Dans la littérature, la mort est souvent un événement qui symbolise. Si la mort d'Emma symbolise la fin d'une existence non-existante, elle peut aussi symboliser la condamnation d'une pécheresse coupable d'adultères tout comme dans Manon Lescault où la mort de Manon semble être la punition divine pour ses fautes ou bien encore la mort de Julien Sorrel dans le Rouge et le Noir.
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